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Un policier braque son arme sur une manifestation, cinq des manifestants sont accusés de violence sur agent !

mardi 13 juin 2017

Tribune

Le 27 avril dernier, à Rennes, au cours d’une manifestation politique de l’entre-deux-tours, le dispositif policier est très impressionnant. À un moment, un motard esseulé prend peur, brandit son arme de service et la braque vers les manifestants. Quelques personnes vont vers lui, lui crient de se calmer et de baisser son arme. Une vidéo toujours en ligne témoigne de cela.

Un mois plus tard, le 31 mai, sept Rennais, dont deux mineurs qui seront relâchés plus tard, sont arrêtés, placés en garde en vue. On ne les a pas convoqués : on est venu les prélever à leur domicile, à 6 heures du matin, au moyen d’une brigade de police opérant avec une grande brutalité. Comme c’est leur droit, les prévenus refusent la comparution immédiate, la procureure (auparavant en poste à l’antiterrorisme) les considère coupables. « Quand on est innocent […] on cherche à prouver son innocence dès qu’on le peut. », déclare-t-elle. Les juges décident de les placer en détention provisoire. L’affaire sera jugée le 21 juin prochain.

Ces cinq personnes sont donc actuellement sous les verrous au motif de « violences sur agent ». Un policier braque une arme sur une manifestation et cinq des manifestants sont accusés de violence sur agent. La seule arme dont on accuse pour l’instant ces personnes d’avoir été en possession est un pommeau de douche.

Une question se pose : des décisions n’ont-elles pas été prises dans la seule fin de briser le milieu militant à Rennes ? Sous couvert de l’état d’urgence et en cherchant en permanence à jouer l’amalgame avec le terrorisme, on inculpe, enferme, condamne des groupes militants sous des prétextes souvent grotesques ou pour des faits absolument bénins. Ainsi certains sont recherchés par la police comme de dangereux criminels : au final de l’enquête, on leur reproche un vol de palettes retrouvées sur un blocage. D’autres, dans l’affaire Balgelstein, sont incarcérés pour avoir dénoncé des publicités sexistes. Les interdictions de manifester sont devenues la norme et n’étonnent plus personne.

Amnesty international, dans son rapport du 31 mai 2017 note que l’application de l’état d’urgence a restreint de manière préoccupante le droit de manifester et se voit obliger de rappeler qu’en France également manifester est un droit. Au-delà de ce droit, c’est la possibilité même de faire de la politique qui est aujourd’hui attaquée. L’espace politique semble se réduire chaque jour comme peau de chagrin. Et les violences dont sont victimes les militants n’ont-elles pas aussi pour but de dissuader tous ceux et celles qui voudraient s’engager politiquement dans les mouvements sociaux qui s’annoncent ?

On est bien en train de vivre, aujourd’hui, un moment de bascule : de façon évidente l’état d’urgence est utilisé pour éliminer des adversaires politiques en les brisant par des arrestations, des condamnations à la prison ferme et des intimidations variées. Rappelons que la plupart de ces militants ont participé au printemps 2016 au mouvement qui s’est opposé à la loi « Travail ».

Nous tenons à rappeler que si nous sommes acteurs de la vie culturelle, artistique, intellectuelle et politique, nous sommes aussi soucieux de la démocratie véritable qui doit permettre l’expression du conflit politique. On ne résoudra pas la crise politique que traverse notre pays en réprimant et en emprisonnant toutes les voix dissidentes. Ces voix-là sont précieuses, aujourd’hui plus que jamais.

En signant ce texte, nous souhaitons :
1° apporter notre soutien aux militants politiques incarcérés ;

2° alerter l’opinion publique sur une dérive policière du pouvoir qui est en train de transformer, très lentement, très sûrement, notre société en une autre.

Rennes, le 13 juin 2017

Bernard Aspe (philosophe), Karine Baudot (écrivaine et photographe), Françoise Bauduin (Enseignante retraitée), André Bernold (écrivain), Sylvain Bertrand (écrivain), Thierry Beucher (comédien), Philippe Blanchet (professeur-Université Rennes 2), Serge Bourgin (SUD-PTT 35), Éditions des Bricoles, Nathalie Burel (écrivaine), Cyril Cléran (éditeur et auteur), CIP Bretagne, Éditions du Commun, Christian Debroize (libraire), Michel Dugué (écrivain), Armand Farrachi (écrivain), Valérie Faucheux (Conseillère municipale de Rennes), Françoise Gèze (ex-PDG Editions La Découverte), Jean-Marie Goater (Éditeur, Maire-adjoint de Rennes), Gérard Hamon (écrivain, historien des mathématiques), Bernard Hennequin (LDH), Jacques Josse (écrivain), Yannick Le Gargasson (conseiller municipal de Rennes), Marie Lemarchand (rédactrice, photographe), Énora Le Pape (candidate France insoumise, Rennes), Jean-Claude Leroy (écrivain), Dominique Leseigneur, Yann Lestréhan (photographe), Ligue des Droits de l’Homme (section rennaise), Maison de la grève, Mandragore (éditrice et dessinatrice), Charlotte Marchandise (Maire-adjointe de Rennes), Pierre Macé (illustrateur), Alain Mala (éditeur), Norbert Maudet (écrivain), Roland Michon (réalisateur), NPA Rennes, David Perrot (artiste), Catherine Phalippou (Conseillère municipale de Rennes), Éditions Pontcerq, Lucie QZN (illustratrice), Yves Robin (le jardin graphique), Wilfrid Salomé (écrivain), Olivier Sarrouy (maître de conférence, Rennes 2), Claude Schopp (éditeur), Léonard Taokao (écrivain), Françoise Terrone (musicienne), Tim Trzaskalik (traducteur), Pascal Trochet (ATTAC), Jean-Paul Tual (conseiller municipal de Rennes), Éric Vuillard (écrivain).

Rejoignez les signataires de cette tribune en envoyant votre nom à :

tribune.soutien gmail.com

Autres signataires à ce jour :

Cédric Alix, Katelin Al Lann, Françoise Asso, Eric Bainvel, Thomas Baudoux, Nicole Beunaiche, Noémie Boudet, Fannie Boulais, Manu Bourgeois, Céline Bouteloup, Jérôme Bouthier, Yann Boutier, Pascal Branchu, Edouard Brichet, Sandro Brozzu, Lize Buisson, Samuel Burette, Fabris Cadou, Albert Calipel, Grégory Camiret, Florent Camus, Thomas Chapron, Dominique Chauvin, Nadia Cherkaoui, Christine Claude, Raymonde Cléran, Eloise Cordier, Pierre Cosquer, Joëlle Couillandre, Jean-Pierre Crozet, Sophie Dagault, Catherine Delille, Elodie Duclos, Christophe Elain, Mathis Fahkri, Charlotte Fillonneau, Lorin Gael, Morwenna Galles, Jean Gerhards, Vincent Gibelin, Laurent Grouet, Gérard Gueniffey, Jonathan Guillaume, Elise Jaunay, Fred Juhel, Pascaline Labbe, Bruno Labouret, Jacques Lacaze, Sylvie Larue, Michelle Lecolle, Jean Le Duff, Felix Le Floch, Gilliane Le Gallic, Chantal Lejaar, Suliane Legendre, Antoine Linget, Gervais Looten, Lise Madec, Alain Madiot, Nicolas Mazard, Flavien Mignour, Catherine Milin, Josiane Moalic Guillemette, Lionel Monier, Pierre Nanpon, Claire Novak, Ludovic Orain, Adrien Pellet, Emeline Poger, Pierre Ramine, Sylvain Rio, Nathalie Roynoard, Jean Salanson, Jeanne Toutous, Pierre Vallée…

(mise à jour vendredi 16 juin 2017)

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