A l’occasion de la énième réforme annoncée concernant les retraites, le groupe La Sociale de la Fédération anarchiste avait diffusé lors de la mobilisation du 10 septembre le tract qu’on lira ci-dessous. Il s’agit pour les militants anarchistes de proposer des pistes pour sortir du cycle infernal des régressions sociales et de préparer la nécessaire contre-offensive.
PAS D’HISTOIRES SUR LES R’TRAITES !
Qu’on ne se raconte pas d’histoires, nous savons tous à quelles conditions éviter une nouvelle défaite sur la question des retraites.
Passer de 37,5 à 43 années de cotisations en à peine vingt ans, en même temps que la précarité et le chômage se généralisent et que les conditions de travail - pour ceux qui en ont un - se dégradent, c’était un pari risqué pour les capitalistes... Eh bien, ils sont en passe de le gagner ! Peut-être n’en espéraient-ils pas autant. Il est vrai qu’ils ont été bien secondés par l’État et les politiciens à leur service, sans parler des médias, mais pas seulement.
Notre résignation aussi les aura bien aidés à porter toujours plus de coups contre nos acquis et nos droits, contre nos vies.
De fait, c’est presque comme si nous croyions davantage que les capitalistes eux-mêmes dans la survie du système. Car le système peut se survivre, bien sûr, sur la base d’une exploitation de plus en plus acharnée et d’une dilapidation des ressources de la planète, sans parler de la mise en concurrence de tous contre tous, des guerres qui menacent. C’est à ce prix que les capitalistes se goinfrent et il est calamiteux que le mouvement social soit infoutu de leur exprimer magistralement (dans le genre qui laisse sonné sur place, avec ou sans décompte...) que cela s’opère sans notre consentement.
Or, nous ne sommes comptables – si nous avons un peu foi en nous-mêmes et en l’humanité - que de la lutte pour notre émancipation, pas de notre servitude volontaire.
Jaurès – qui n’était pas anarchiste – parlait du droit à la retraite comme d’une « victoire de la vie ». Hollande – lui - prétend que l’espérance de vie augmentant, il faut travailler plus longtemps. Il veut restaurer la retraite des morts.
Répétons-le : nous savons tous à quelles conditions éviter un nouveau recul sur la question des retraites.
Deux jours de grève générale pour le retrait du projet - trois à la limite – suffiraient pour que le gouvernement retire son projet dare-dare, pour que le patronat ravale sa morgue, le trouillomètre à zéro.
Aux dirigeants syndicaux qui se complaisent dans la concertation-mascarade, nous disons : Soyez au moins réformistes ! Le réformisme syndical consiste à lutter pour des améliorations graduelles, en aucun cas accompagner les régressions. Méprisez toutes ces pseudo négociations. Il n’y a rien à négocier ! Rejet du plan ! Le réformisme n’implique pas de s’aligner sur l’apathie de nombreux exploités dans le contexte des lois sur la représentativité. C’est du cousu-main pour les dominants car il y aura toujours parmi vous un bureaucrate de plus pour signer des accords encore plus pourris que l’ANI !
Aux travailleurs, jeunes, retraités, nous disons qu’il faut que notre résignation se transforme en révolte. Une vraie révolte, pas une plate indignation qui finit toujours en courbettes devant les puissants et en ticket perdant aux élections. Au-delà de la défense de nos intérêts, c’est aussi une question d’honneur. Réinvestissons les syndicats ou créons d’autres instruments de lutte. Rien ne s’oppose si nous prenons nos affaires en mains.
Oui, la grève générale jusqu’au retrait du projet, c’est le minimum !
Au-delà : retour aux 37,5 pour un taux plein ! Pas de misérables « points » pour la pénibilité, mais une réelle amélioration des conditions de travail ! 25 heures pour les travaux pénibles !
En attendant, si nous organisons sur la seule exigence du retrait un front du refus par le blocage général du pays (et pas un blocage par procuration - cette fois - mais un mouvement d’ensemble dont chacun sera partie prenante), si nous exprimons pleinement notre colère en occupant nos taules et les rues de nos villes, ils remiseront leur plan mortifère. Nous pourrons même commencer à reconquérir tout le terrain perdu au profit de la classe capitaliste.
Nous autres, anarchistes, pensons qu’identifier les obstacles à ce mouvement nécessaire, c’est en grande partie les lever.
Ainsi, et au-delà de la résignation savamment entretenue des exploités, nous pensons qu’il y a trop de considérations politiciennes derrière l’action syndicale. Les déclarations, fussent-elles unitaires, sont emplies d’arrière-pensées. Nous pensons que prescrire des programmes quasi gouvernementaux - ceux-là qui ont été retoqués lors des dernières élections (le programme du Front de gauche, quoi !) - dans un mouvement nécessairement défensif au départ est une grave erreur. Nous n’avons aucunement besoin d’être majoritaires dans le cadre d’un projet politique et gouvernemental pour gagner sur nos revendications. Il faut selon nous extirper du mouvement syndical tout ce qui tend à servir la soupe aux politiciens.
Nous n’avons plus les moyens de la sophistication ni de faire les marioles, sauf à nous illusionner et à nous disposer à perdre. Le raisonnement est simple. Les capitalistes sont une poignée et ils contrôlent tout. Nous pouvons tout bloquer sur la base de ce que nous produisons tout.
Les dévots qui nous serinent les « alternatives » nécessaires, les « choix » à opérer, les « redistributions » souhaitables pour mieux passer sous la table l’exigence du retrait nous emberlificotent. C’est à croire que certains d’entre eux espèrent une nouvelle défaite sur les retraites – et demain sur la sécu - pour mieux faire mousser tel ou tel programme lors du prochain cirque électoral ! D’ores et déjà, telle fraction politique aura-t-elle des strapontins dans les municipalités si elle se montre un peu méchante avec le gouvernement ? Et pour quoi y faire ? Tel tribun ne se voit-il pas déjà en haut de l’affiche avec la piétaille militante en bas (discipline, hiérarchie, État...) ?
La réalité de l’exploitation est de plus en plus cruelle et nous retiendrions nos coups dans le vague espoir d’une alternative électorale ? L’alternance effectuée - ah ? - nous tenterions d’infléchir le cours des choses ? Une gauche de gauche ? Une gauche vraiment à gauche ? Quel temps perdu ! Quel renoncement ! Et en misant sur quels représentants ?
Le mouvement social n’a aucune proposition de type citoyenniste à avancer . C’est classe contre classe. Et nous devons entretenir notre sentiment de classe avec autant d’ardeur que les capitalistes veillent sur leurs intérêts. Nous saurons bien nous gouverner nous-mêmes quand nous aurons commencé à dézinguer ce vieux monde en partant d’une lutte revendicative. Le préalable, c’est quand même de faire l’expérience d’une victoire.
Pour nous, anarchistes, la grève partielle contient en germe la grève générale. Et la grève générale débouchera naturellement sur la grève expropriatrice et gestionnaire si nous fonctionnons sur la base du fédéralisme et du respect des mandats.
Abrogation de toutes les contre-réformes sur les retraites ! Reconquête de tous les droits !
Se disposer à perdre sur la question des retraites, c’est se préparer à perdre sur la sécu. C’est ouvrir un boulevard au FN qui, même sans alliance avec la droite « républicaine », fera toujours mieux que le FG en terme électoral. Les électeurs, c’est comme ça...
Les anarchistes appellent tous les militants ou pas encore militants qui partagent ce point de vue à le faire vivre dans les syndicats et/ou hors des syndicats, dans les entreprises et dans les quartiers, dans les facs, partout !
Les anarchistes appellent tous ces militants ou pas encore militants à les rejoindre pour s’organiser.
Pour que l’humanité perdure, il faut que le capitalisme disparaisse. Nous ne sauverons que ce pour quoi nous luttons. Nous n’aurons que ce que nous prendrons.
groupe La Sociale de la Fédération Anarchiste
local La Commune 17 rue de Châteaudun, Rennes
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